30 décembre 2005
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Hashimoto Takako (1899-1963) fut une haïjin à une époque où on ne laissait guère les femmes s'exprimer autrement que dans le carcan de la tradition. Née et élevée à Tokyo, Takako était la
petite-fille du directeur de la très réputée école de Koto Yamada, instrument dont elle était elle-même une virtuose. On s'attendait à ce qu'elle succède un jour à son grand-père, mais elle perd
son père à l'âge de douze ans et on la fiance bientôt avec un homme de dix ans son aîné. Elle épouse ainsi Hashimoto Toyojiro en 1917 et, symboliquement, renonce définitivement à la pratique du
koto. Toyojiro est architecte. Il a fait en partie ses études aux Etats-Unis et a l'esprit plutôt ouvert pour l'époque. Il est sincèrement épris de sa jeune et belle épouse et va encourager ses
penchants artistiques. Dans une villa de style Tudor que Toyojiro a fait construire au sommet d'une colline, le couple accueille de nombreux artistes et écrivains. Auprès du voisinage, ils font
figure de "stars hollywoodiennes" avec leur grosse voiture, très rare pour l'époque.
Parmi les invités du couple figurent plusieurs auteurs de haïkus, notamment des femmes, dont Sugita Hisajo. A cette époque, émergent plusieurs haïjins féminines qui incarnent le changement culturel de l'ère du Meiji. Elles s'écartent résolument du rôle traditionnel dévolu à la femme japonaise et incarnent le féminisme naissant au Japon. Une voie qui ne pouvait qu'intéresser un esprit indépendant et brillant comme celui de Takako.
Encouragée par son époux, Takako apprend à vingt-deux ans l'art du haïku avec Sugita Hisajo, faisant preuve d'excellentes dispositions. Son mentor publie ses premières oeuvres dans des revues locales, attirant rapidement l'attention sur la jeune poétesse. Sa renommée croît rapidement, et à moins de trente ans, elle est reconnue à la fois pour son art et pour sa grande beauté.
Malheureusement, son mari bien-aimé tombe malade et décède en 1937, la laissant élever leurs quatre filles. Jusqu'au bout, elle se sera occupée de lui et ne se remettra jamais tout à fait de cette perte.
Ne cessant d'écrire des haïkus, impliquée dans plusieurs cercles de poètes et revues de haïkus qu'elle fonda ou aida à fonder, Hashimoto Takako s'affirme comme la haïjin la plus populaire du Japon. Même après son décès d'un cancer en 1963, divers sondages auprès des amateurs du genre la placent régulièrement en tête.
Son style est sobre, proche de la tradition. La première fois que j'ai eu l'occasion de lire ses oeuvres (grâce à Jean Antonini de l'AFH, qu'il en soit chaudement remercié ici), j'ai été littéralement cloué sur place par la puissance évocatrice des haïkus de Takako, qui puisent directement dans son histoire personnelle des accents très émouvants, sans toutefois céder un seul instant au pathos dont un occidental n'hésiterait pas à user. Hélas, ses oeuvres sont difficiles à trouver. Les poèmes suivants sont extraits de Neige des lointaines cimes publié et traduit par Makoto Kemmoku et Patrick Blanche au Japon. C'est en lisant de telles merveilles que je mesure le chemin que j'ai à parcourir ...
Parmi les invités du couple figurent plusieurs auteurs de haïkus, notamment des femmes, dont Sugita Hisajo. A cette époque, émergent plusieurs haïjins féminines qui incarnent le changement culturel de l'ère du Meiji. Elles s'écartent résolument du rôle traditionnel dévolu à la femme japonaise et incarnent le féminisme naissant au Japon. Une voie qui ne pouvait qu'intéresser un esprit indépendant et brillant comme celui de Takako.
Encouragée par son époux, Takako apprend à vingt-deux ans l'art du haïku avec Sugita Hisajo, faisant preuve d'excellentes dispositions. Son mentor publie ses premières oeuvres dans des revues locales, attirant rapidement l'attention sur la jeune poétesse. Sa renommée croît rapidement, et à moins de trente ans, elle est reconnue à la fois pour son art et pour sa grande beauté.
Malheureusement, son mari bien-aimé tombe malade et décède en 1937, la laissant élever leurs quatre filles. Jusqu'au bout, elle se sera occupée de lui et ne se remettra jamais tout à fait de cette perte.
Ne cessant d'écrire des haïkus, impliquée dans plusieurs cercles de poètes et revues de haïkus qu'elle fonda ou aida à fonder, Hashimoto Takako s'affirme comme la haïjin la plus populaire du Japon. Même après son décès d'un cancer en 1963, divers sondages auprès des amateurs du genre la placent régulièrement en tête.
Son style est sobre, proche de la tradition. La première fois que j'ai eu l'occasion de lire ses oeuvres (grâce à Jean Antonini de l'AFH, qu'il en soit chaudement remercié ici), j'ai été littéralement cloué sur place par la puissance évocatrice des haïkus de Takako, qui puisent directement dans son histoire personnelle des accents très émouvants, sans toutefois céder un seul instant au pathos dont un occidental n'hésiterait pas à user. Hélas, ses oeuvres sont difficiles à trouver. Les poèmes suivants sont extraits de Neige des lointaines cimes publié et traduit par Makoto Kemmoku et Patrick Blanche au Japon. C'est en lisant de telles merveilles que je mesure le chemin que j'ai à parcourir ...
Le parfum des lys
Une infirmière qui peigne
les cheveux d'un mort
Mon époux couvert
par les chrysanthèmes blancs
Juste en soustraire un
Neige impétueuse
Dans ses bras je me trouvais
le souffle coupé
Le bout d'une lame
pénétrant la pêche rose
cassant le noyau
En lambeaux mon passé
Par poignées tombent les
fleurs de cerisier
Regrets de mon époux...
La chouette me hulule
de m'éteindre aussi
Deux sites (hélas en Anglais) consacrés à Hashimoto Takako:Une infirmière qui peigne
les cheveux d'un mort
Mon époux couvert
par les chrysanthèmes blancs
Juste en soustraire un
Neige impétueuse
Dans ses bras je me trouvais
le souffle coupé
Le bout d'une lame
pénétrant la pêche rose
cassant le noyau
En lambeaux mon passé
Par poignées tombent les
fleurs de cerisier
Regrets de mon époux...
La chouette me hulule
de m'éteindre aussi
- The illustrated haïku of Hashimoto Takako
- The World Haiku Review: a Wave of Moonlight - Women Poets of Japan, dont la biographie ci-dessus est un résumé.