Il m'est arrivé ici et là d'exprimer mon insatisfaction vis à vis de ce que j'écris. Depuis quelque temps, l'insatisfaction en question revient et monte tout doucement, mais pas pour les mêmes raisons que dans les deux billets précédents.
J'ai commencé ce blog en me lançant un petit défi personnel: la mise à jour quotidienne. Cela n'a pas toujours été facile, et au début je ne me sentais pas à l'aise si je n'avais pas deux ou trois jours de haïkus ou d'articles divers d'avance.
Petit à petit, je me suis décontracté. A force d'écrire que le haïku était pure expérience et nécessitait une sorte de détente du mental pour accueillir la beauté présente dans des événements minuscules, j'ai fini par y croire
Par ailleurs, ma conception personnelle du haïku s'affine progressivement. Ainsi, j'ai pris quelques distances -entre autres- avec l'impératif du 5-7-5 (j'aurai l'occasion d'y revenir).
Il m'arrive donc maintenant fréquemment de ne pas avoir la moindre idée du sujet de l'article du jour en me levant le matin. Je crois que j'aime bien le côté "sans filet" de cette approche. Cela ancre le haïku dans la vie même et me conduit à garder l'oeil grand ouvert, deux choses qui me paraissent importantes.
Alors que se passe-t-il? Eh bien j'ai l'impression de stagner. Lorsque je lis les haïkus des Maîtres, je suis souvent stupéfait de voir ce que l'on peut faire tenir dans un poème si court. Il y a là quelque chose de presque magique. Il est sans doute un peu exagéré de vouloir, après quelques années de pratique, atteindre un tel niveau, mais j'ai envie de franchir une étape dans mon écriture. J'ai le sentiment de tourner un peu en rond.
Serge Tomé, avec lequel j'en discutais par email, me dit que c'est normal et me conseille de travailler sur le regard et d'étudier la composition en peinture (orientale, mais pas uniquement). Les conseils de Serge sont toujours judicieux, et il n'en est jamais avare. Je ne reproduirai pas ici son email, mais je le décortique encore à l'heure actuelle tant il est riche d'enseignements et de directions à prendre.
Je sens bien que je vais devoir progresser dans deux directions:
- la fraîcheur et la disponibilité du regard, bien que j'aie déjà avancé dans ce domaine
- la technique pure. Pour cela, lire et relire les Maîtres et aussi des ouvrages analysant la poésie japonaise et chinoise. Ensuite ... tout oublier, c'est à dire intégrer tout cela de manière si fluide que je n'aurai plus à y penser. Je me méfie en effet des procédés mal digérés tels qu'en regorge le Petit Manuel pour écrire des haïkus, de Philippe Costa. Non que ce soit un mauvais ouvrage, loin de là, mais je crois qu'il faut plus que des recettes de cuisine pour écrire des haïkus.
Car la poésie est création, et non fabrication.