9 août 2006
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14:52
Sarinagara, c'est la dernière phrase du poignant haïku écrit par Kobayashi Issa après la mort à l'âge de deux ans de sa fille Sato:
dont voici le texte japonais original:
C'est aussi le titre de ce beau livre de Philippe Forest. En quatre tableaux et en suivant l'itinéraire du narrateur de La France au Japon, on y apprend comment des êtres confrontés à l'inacceptable peuvent cependant y survivre: la perte d'un enfant pour Kobayashi Issa, le grand romancier et poète Natsume Sôseki, et le narrateur lui-même, ou bien la découverte de l'horreur nucléaire pour Yosuke Yamahata, qui photographia Nagasaki le lendemain de sa destruction.
L'horreur et la douleur, si intenses qu'elles peuvent en quelque sorte vous anesthésier. On penserait ne pouvoir y survivre, on prend conscience de la vanité et de la fragilité des choses dans ce que les orientaux appellent "le monde flottant". On réalise, à l'instar des maîtres Zen et de ceux qui ont atteint l'éveil que, fondamentalement, il n'y a rien. Rien de permanent, rien à quoi se raccrocher.
Et pourtant ...
Tout tient dans ce "et pourtant" écrit par Issa quelques temps après la mort de son enfant.Et pourtant ... on survit. Et pourtant ... on n'oublie pas, mais on s'habitue, c'est tout (Jacques Brel). Tout doucement, on surmonte l'épreuve, en retrouvant parfois au bout du monde la réalité d'un rêve d'enfant, comme le narrateur.
Un livre grave, fort bien écrit, à lire dans le calme et que je vous recommande. Un style sobre, une ambiance parfois pesante mais jamais lourde. Classé comme "Roman" par Galimard, ce n'en est pas vraiment un. Ce n'est pas un livre qui se raconte, avec des personnages et une intrigue. Plutôt une méditation sur la vie qui passe et ne signifie apparemment rien. Et pourtant ...
A propos de Nagasaki, il y a aujourd'hui exactement 61 ans que la ville a été rasée par la bombe atomique Fat Man. Des milliers de colombes ont été lâchées dans le ciel de la ville, comme autant d'âmes. Il faut croire que cela n'a pas servi de leçon et que les humains n'ont toujours pas compris ...
Un qui n'a pas compris, c'est le brigadier général Paul Warfield Tibbets. Mais si, Paul W. Tibbets, le pilote de l'Enola Gay qui largua la première bombe atomique sur Hiroshima. Comme beaucoup d'autres, je croyais à la légende qui le disait rendu fou par l'horreur de son geste. Il n'en est rien. Toujours de ce monde, bon pied bon oeil, il explique sur son site les raisons stratégiques de sa mission et en assume totalement les conséquences tragiques. Aucune remise en question ni même aucune parole de compassion pour les victimes de la bombe et des radiations. Plus choquant encore, une boutique en ligne où, moyennant 500 dollars US, vous pourrez vous procurer -entre autres- une maquette de la bombe Little Boy larguée sur Hiroshima, signée par le héros du jour en personne. Il faut dire que son second prénom, Warfield, signifie "champ de bataille". Peut-être bien qu'il est devenu fou, finalement.
monde de rosée
rien qu'un monde de rosée
pourtant et pourtant
rien qu'un monde de rosée
pourtant et pourtant
dont voici le texte japonais original:
tsuyu no yo wa
tsuyu no yo nagara
sari nagara
tsuyu no yo nagara
sari nagara
C'est aussi le titre de ce beau livre de Philippe Forest. En quatre tableaux et en suivant l'itinéraire du narrateur de La France au Japon, on y apprend comment des êtres confrontés à l'inacceptable peuvent cependant y survivre: la perte d'un enfant pour Kobayashi Issa, le grand romancier et poète Natsume Sôseki, et le narrateur lui-même, ou bien la découverte de l'horreur nucléaire pour Yosuke Yamahata, qui photographia Nagasaki le lendemain de sa destruction.
L'horreur et la douleur, si intenses qu'elles peuvent en quelque sorte vous anesthésier. On penserait ne pouvoir y survivre, on prend conscience de la vanité et de la fragilité des choses dans ce que les orientaux appellent "le monde flottant". On réalise, à l'instar des maîtres Zen et de ceux qui ont atteint l'éveil que, fondamentalement, il n'y a rien. Rien de permanent, rien à quoi se raccrocher.
Et pourtant ...
Tout tient dans ce "et pourtant" écrit par Issa quelques temps après la mort de son enfant.Et pourtant ... on survit. Et pourtant ... on n'oublie pas, mais on s'habitue, c'est tout (Jacques Brel). Tout doucement, on surmonte l'épreuve, en retrouvant parfois au bout du monde la réalité d'un rêve d'enfant, comme le narrateur.
Un livre grave, fort bien écrit, à lire dans le calme et que je vous recommande. Un style sobre, une ambiance parfois pesante mais jamais lourde. Classé comme "Roman" par Galimard, ce n'en est pas vraiment un. Ce n'est pas un livre qui se raconte, avec des personnages et une intrigue. Plutôt une méditation sur la vie qui passe et ne signifie apparemment rien. Et pourtant ...
A propos de Nagasaki, il y a aujourd'hui exactement 61 ans que la ville a été rasée par la bombe atomique Fat Man. Des milliers de colombes ont été lâchées dans le ciel de la ville, comme autant d'âmes. Il faut croire que cela n'a pas servi de leçon et que les humains n'ont toujours pas compris ...
Un qui n'a pas compris, c'est le brigadier général Paul Warfield Tibbets. Mais si, Paul W. Tibbets, le pilote de l'Enola Gay qui largua la première bombe atomique sur Hiroshima. Comme beaucoup d'autres, je croyais à la légende qui le disait rendu fou par l'horreur de son geste. Il n'en est rien. Toujours de ce monde, bon pied bon oeil, il explique sur son site les raisons stratégiques de sa mission et en assume totalement les conséquences tragiques. Aucune remise en question ni même aucune parole de compassion pour les victimes de la bombe et des radiations. Plus choquant encore, une boutique en ligne où, moyennant 500 dollars US, vous pourrez vous procurer -entre autres- une maquette de la bombe Little Boy larguée sur Hiroshima, signée par le héros du jour en personne. Il faut dire que son second prénom, Warfield, signifie "champ de bataille". Peut-être bien qu'il est devenu fou, finalement.